texte n°4 - Le Mariage de Figaro  (1784)- Acte V scène 3  (extrait)

Le Monologue

Nous sommes à l'acte V : Le Comte a obtenu de Suzanne un rendez-vous dans le parc mais c'est la Comtesse déguisée en Suzanne qui a pris sa place. Figaro qui est témoin de la scène mais qui n'a pas été mis au courant se croit trompé. L'extrait de la sc 3, qui est l'objet de notre explication, est le début du long monologue de Figaro. Celui-ci est dans une telle colère qu'il parle tout seul et est en proie à une grande agitation. Il en veut d'abord à Suzanne qui, croit-il, l'a trahi mais aussi au Comte qui s'est moqué de lui et cela va l'amener à comparer les deux existences, la sienne et celle de son maître.

Comment le problème personnel de Figaro va l'amener à dénoncer l'injustice de la société?

  1. la colère et le désarroi du héros

  2. Le ressentiment contre Suzanne et le Comte

  3. la dénonciation de l'injustice


I. (je veux démontrer que) Figaro est dans un état de colère et de désarroi.

§(Parce que) on le voit par son discours entrecoupé d'exclamations, d'interrogations qui n'attendent pas de réponse (interrogations oratoires) mais qui marquent son émotion.« Femme!Femme!Femme! » (ton instinct) « est-il donc de tromper ? »

§(Parce que) Son discours est svt incohérent, séparé par des points de suspension, Figaro est d'une grande nervosité : les didascalies insistent sur le fait qu'il marche de long en large, il ne finit pas ses phrases « au moment même de la cérémonie... », il passe d'une idée à l'autre sans aucune logique par le jeu des pronoms, par exemple et le spectateur doit comprendre au vol ce dont il parle. « Elle me donne sa parole; au milieu même de la cérémonie... IL riait en lisant ». Ainsi il passe de Suzanne au Comte et au souvenir de la scène où il avait vu le Comte lire le billet de Suzanne et il comprend rétrospectivement le rire de son maître et cela le met en fureur.

§ (Parce que) les jeux de scène soulignent son agitation puis sa lassitude (didascalie) : par les points de suspension, on comprend qu'il marche de long en large, il passe d'une réflexion à haute voix à un monologue intérieur, il croit que qq arrive et il interrompt son discours pour s'apercevoir rapidement qu'il s'est trompé : « on vient...c'est elle...ce n'est personne ». on voit qu'il est très énervé jusqu'au moment où, au contraire, il se fatigue et s'assoit sur le banc ( didascalies), tout à fait accablé et découragé :« et me voilà faisant le sot métier de mari quoique je ne les sois qu'à moitié »

Donc le personnage est dans un état de fureur total car il a le sentiment d'avoir été trompé et il laisse éclater sa rancoeur.

II. (je veux démontrer que) Figaro est furieux contre Suzanne et contre le Comte.

§ (Parce que) sa colère s'exprime contre toutes les femmes et non pas seulement contre Suzanne et de manière grandiloquente par une triple invocation « femme! Femme! Femme!. Pour lui la femme est menée par son « instinct » et un instinct mauvais; elle n'a pas par nature la liberté de choisir sa conduite, ce qui la ravale au rang d'« animal » et, non d'être humain. Il reprend ainsi les vieux clichés bibliques sur la femme qui trompe l'homme; l'exemple qui suit l'affirmation et qui lui semble caractéristique de cette conduite féminine est évidemment celui de Suzanne :il se rappelle la promesse et à l'impression d'une profonde duplicité « au moment même »

Contre le Comte, Figaro n'est pas moins en colère: « le perfide !» : il a le sentiment d'avoir été trompé par une machination des deux amants et de ne pas avoir vu arriver le coup « et moi le bênet !»

Cette colère contre le comte et contre lui-même le conduit à un défi, il passe de la 3° personne à la 2° « vous ne l'aurez pas !» comme si le Comte était présent.

Ainsi sa colère conduit Figaro à défier le Comte et ensuite, de façon logique, il va évaluer ses chances de réussite ds le combat qu'il s'apprête à mener.

III. (je veux démontrer qu') En comparant sa vie à celle du Comte, Figaro est amené à dénoncer l'injustice sociale.

car le Comte n'a jamais eu à faire le moindre effort, car la vie lui a tout donné, Figaro fait une énumération des privilèges: « noblesse, fortune, un rang, des places » qui viennent tous ensemble et font du Comte un privilégié alors qu'il n'a rien fait, ce que Figaro résume par une formule très ironique, restée très célèbre; vous vous êtes donné la peine de naître ! » comme si la naissance demandait le moindre effort à celui qui vient à la vie. Il s'ensuit que le Comte est forcément « un homme assez ordinaire », même si lui-même est « fier » et s'il se croit « un grand génie ».

Figaro, lui, n'a pas cessé de se battre car la vie ne lui a rien offert : « tandis que, moi, morbleu perdu ds la foule obscure » et il a été obligé de travailler et faire preuve d'intelligence ce qu'il dit avec beaucoup d'amplification quand même car il compare son talent à celui qu'il faudrait pour gouverner « les Espagne »( càd Espagne et ses colonies) pendant cent ans. N'oublions pas que la pièce est censée se passer en Andalousie et  toute cette intelligence n'a réussi qu'à lui permettre de « subsister », donc un résultat dérisoire. Donc pour Figaro c'est paradoxalement son origine humble, son manque d'argent, la dureté de sa condition qui lui donnent des atouts ds la bataille qu'il a à livrer contre le Comte qui lui est resté "un homme ordinaire"  parce qu'il n' jamais eu besoin de se battre.


Donc on voit comment à partir de son problème personnel, celui qu'il croit avoir avec Suzanne, Figaro est amené à poser le problème de l'injustice sociale, à mettre en question les privilèges de la noblesse et à lui opposer le dynamisme des pauvres, eux qui doivent se battre pour vivre. Dans la suite du monologue, Figaro va évoquer tous les métiers qu'ils a exercés pour à chaque fois échouer et ensuite repartir avec le même courage. C'est pourquoi il a été senti comme le représentant de la bourgeoisie, de la classe travailleuse et inventive à côté de la noblesse inactive et orgueilleuse et c'est aussi pour cela et que la pièce à a été censurée par le pouvoir et a connu un tel succès quand elle a pu être jouée en 1784.

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Le texte :

Acte V,  sc 3

" Femme, femme, 

femme ! "....(Il s'assied sur un banc.)

Le texte  complet

de la pièce.